Chansons Pour La Loterie Pierrot Et Jean Lagrèle LEVINAS MICHAEL
Classique
Description :
Commande de l'IMEC et de l'Abbaye de Royaumont, ces trois chansons qui mettent en musique des textes de Valère Novarina ont été écrites pour l'ensemble vocal De Caelis (cinq voix de femmes spécialisées dans l'interprétation de la musique médiévale).
Ces trois chansons ont été crées en mai 2008 à Caen, à l'Abbaye d'Ardenne.
Les choix qui ont guidé l'écriture de cette pièce sont liés à des préoccupations concernant, non seulement la relation texte-musique, la structure littéraire d'un texte et la forme musicale. Ces préoccupations portent sur une problématique très circonscrite: décrypter un lien plus originaire entre des structures linguistiques et sémiotiques d'une phrase et celles qui génèrent ce que j'entends par le terme: phrase musicale.
Dans Trois Chansons pour la Loterie Pierrot et Jean la Grêle, tout comme dans Le "O" du Haut, le travail de composition se fonde sur cette relation complexe qui se noue entre "le son et le sens".
Il en résulte une écriture polyphonique, basée sur l'Arsis et Thésis de la phrase musicale soulignée par des processus harmoniques, une organisation de l'accentuation et du rythme basé, à la fois sur la tension-détente harmonique, l'évolution des échelles et la prosodie si souple d'une langue française pour laquelle j'exige l'exactitude d'une prononciation populaire, telle que j'ai pu l'entendre dans mon enfance chez les "gens de la campagne"... (la deuxième chanson en particulier La loterie Pierrot...)
La chair de l'Homme de Valère Novarina, livre puissamment original, à la fois prose, poésie et théâtre virtuel correspondait exactement à mes attentes et aux orientations de mon écriture.
Les cinq chanteuses de l'ensemble De Caelis, placées en pentagone sur la scène, s'interpellent... Elles fragmentent dans l'espace les noms propres, les mots, les formes grammaticales de la langue de Novarina.
Les voyelles opèrent des cycles giratoires dans l'espace. Elles passent ainsi d'une voix à l'autre, faisant évoluer par ce déplacement dans l'espace les hauteurs chantées, comme un effet doppler.
Il ne faut pas se méprendre sur l'apparente simplicité grammaticale des textes que j'ai choisi dans La Chair de l'Homme de Novarina: le sujet, le verbe et le complément d'objet direct.
Cette apparente simplicité grammaticale, sans cesse réitérée, révèle pour moi l'essence de la phrase musicale et une forme qui s'inspire de ce théâtre virtuel de Novarina et sa quête métaphysique.
Ce livre de Novarina est aussi une allégorie de la temporalité de ses pièces et des personnages de son théâtre.
Jean la Grèle et la multitude des autres noms morts ou vivants apparaissent, sortent de leurs mondes modestes, leurs tombes. Ils participent à une fête foraine onirique, puis la "loterie Pierrot qui s'arrête (doucement...) sur le huit".
Le prologue à la deuxième chanson, consiste à réveiller les morts par une longue énumération liturgique des noms. Novarina consacre plusieurs pages de La chair de l'Homme à cette énumération des noms.
La dernière des trois chansons est consacrée au nom presque imprononçable de "Deus".
Michaël Lévinas